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Kaléïdos-coop
4 février 2010

Verres luisants

Tu plonges ta main dans ta poche intérieure et en sort une photo jaunie que tu me tends. Les fantômes du passé, les ombres aux couleurs passées, tout ça me revient en pleine tête.

Ah ça, faire les cons on savait!

Pour ce qui a été d'être monotones quand nos vingt ans divers sont arrivés, ce fut une autre affaire...

Pas une photo de cette époque sans qu'on fasse une grimace, une acrobatie, un jeu d'ombre. On était pas des lumières, mais pas besoin d'abat-jour sur nos jeunes jours. C'était l'époque épique des porcs-épics fringués à l'as de pique, l'époque épicurienne des études. On peux pas dire qu'on suivait des études de quoi que ce soit, c'était plutôt l'inverse. Les études qui nous poursuivent et nous qui pousuivions nos idéaux (et la première fille quelle qu'elle soit).

Le jour de cette photo-là, je me rappelle très bien de ce qu'on faisait. Deux heures d'amphi insoutenables, à glisser sous la table petit à petit, au même rythme que descendait notre taux d'alcool dans notre sang. Faut bien dire qu'on n'avait pas lésiné la veille, à l'anniversaire de Paco. Les yeux vitreux, on avait quand même réussi à ne pas aller nous recoucher le matin, et à prendre le chemin de la fac sans s'arrêter au bistrot du bas pour se vider la cartouche de sûreté, celle qui te condamne à vérifier de plus près que la faience, c'est froid.

Deux heures d'autant plus insoutenables que dehors, il faisait beau. on a passé le reste de la journée à faire les cons, à nous prendre en photo, à parler de tout et de rien, à faire de rien un tout, à refaire le monde. On ne savait pas que c'est le monde qui allait nous défaire.

Ah ça, faire les cons on savait!

Pour ce qui a été d'être monotones quand nos vingt ans divers sont arrivés, ce fut une autre affaire...

Aujourd'hui on est comme deux cons, assis là parmi d'autres. Du bétail qui sort de l'abattoir du travail. La gueule de bois, on l'a depuis pas mal d'années, depuis que notre patron nous a dit "j'ai rien à vous reprocher, mais j'vais devoir vous virer". Même pas besoin de picoler pour avoir le casque en fonte, alors pour le soulager, ben on s'est mis à picoler. On a arrêté les acrobaties, sauf les chutes régulières dans le caniveau... On a arrêté les grimaces, nos visages grêlés s'en chargent.

Ta femme s'est barrée, j'ai pas su retenir la mienne, on court toujours derrière la première désepérée qui veux bien nous accorder un peu de temps...ou qui a besoin de pognon. Et on est là, comme deux cons, devant ce morceau de zinc froid et ces verres luisants. Comme deux vieux cons qui regardent rentrer ces deux jeunes cons, étudiants probablement. Devant l'entrée du rade, ils ont pris en photo l'ombre de leur acrobatie.

Ah ça, faire les cons on savait!

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Commentaires
J
Bah, j'avais envie de conjurer le sort en prenant les devants!!! (mais effecivement, et heureusement que les cons on sait toujours faire!)
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G
Ca, les cons, on sait toujours faire! mais je n espère pas finir comme dans ton texte d'ici quelques années... ;-)
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A
Ouais, Roger, fait péter les rôteuses !
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J
haha! Santé!<br /> (roger, tu met une tournée pour la tribu?)
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A
Hummm... une biere?<br /> ; )
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